jeudi 28 mai 2009

Il était une fois un diablotin

Il était une fois un diablotin au fond d'un tiroir. Il était si timide qu'il n'en sortait que le soir. Et alors, dans la grande maison vide, vide de tout occupant humain, Arthur le diablotin avait le droit d'être un peu plus à l'aise... Il défripa un peu son habit de poil de souris et fit quelques pas .....

"Aujourd'hui, ce n'est pas comme d'habitude... d'où me vient cette énergie, grand TAO, merci!" Il sortit du tiroir, celui que personne n'ouvrait, le tiroir du buffet, dans le salon.

Arthur se mit à marcher promptement, une fois sorti du tiroir, vers un lieu moins à découvert. Il fit deux pas, trouva une immense table. Il en fit trois autres, et se trouva nez à nez avec une personne d'allure alerte qui fonçait vers lui sans le voir, à grands pas.

Il se tassa. C'était un réflexe, et pourtant, il savait que cette personne, de prime abord, ne pouvait le voir, aveuglée par la lumière qu'elle venait d'allumer. Il se dépêcha mais... trop tard! Cette jeune femme vit une ombre qui courait se réfugier... elle ouvrit le tiroir... Avant de voir Arthur s'y glisser, jamais elle n'avait remarqué le tiroir dans le buffet. Une grande rainure tenait lieu de poignées. On devait y insérer les doigts et tirer vers soi...

ODILE, ce soir-là, était restée chez elle, profitant d'un léger refroidissement, d'un rhume commençant, pour prendre un congé. Ouvrant vite le tiroir, elle vit, blotti, Arthur qui tremblait très violemment. Oh! dit-elle avec émotion. Oh! Qui es-tu, petit personnage parcouru de frissons?

Qui est-elle, se dit Arthur, après tout, c'est peut-être un ange, comme elle a une douce voix! Il toussota un peu, d'une façon brusque et sèche, il dit: "Arthurrrrr..."

ODILE; Viens, viens, qu'on se parle et qu'on se voie. Viens avec moi sur le sofa là-bas. Tu es timide... voilà, je ne te regarde pas, mais grimpe ici, tu vois, je suis grassette, mon épaule est douillette. Ah, n'aie pas peur, viens donc, je ne te mangerai pas!

ARTHUR: C'est la première fois que je rencontre un humain. Je croyais fermement qu'ils étaient tous méchants. Vous n'êtes pas un ange, n'est-ce pas?

ODILE (amusée): Peut-être un peu, mais ma foi, j'ai un peu de lourdeur dans l'aile et des mondes parallèles, c'est la première visite que je reçois. C'est pour moi un honneur de vous recevoir chez moi! A propos, depuis combien de temps es-tu là?

ARTHUR: Ah, tu sais, le temps, pour moi, il coule en emportant passé, présent et même le futur; cette dimension est inconnue chez moi, je veux dire dans ce monde très réel de l'au-delà! Tu sais que ce monde est connecté au tien et d'une façon indissociable, et que ces deux mondes peu à peu s'interpénètrent pour un jour pouvoir vibrer à l'unisson du grand Tao, qui contient tout, même le vide, même celui qui obscurcit notre intérieur. Et aussi l'harmonie des sources qui se croisent et ainsi se ressourcent.

ODILE: Tu sais, j'ai beaucoup lu sur l'au-delà, dans tous les sens du mot. Mais je ne le connais que par mes rêves et les images et les voix qui m'habitent.

ARTHUR: Hé, tu es connectée! Tu sais, ce monde de l'au-delà, pour chacun il se colore et se forge d'originale façon. Il n'est pas figé comme le vôtre de manière physique. Il se meut comme le vent souffle et à l'unisson du Tao qui vibre agréablement de diverses façons. Tous les intérieurs humains, je veux dire leurs esprits, ont tout l'espace voulu pour jouir d'innombrables possibilités, s'ils leur donnent la chance de germer. Il faut d'abord avoir un brin d'espoir et le garder comme on gardait le feu durant la préhistoire, avant d'avoir appris à le domestiquer. Il faut garder ce brin d'espoir au milieu de soi comme un phare allumé dans la grisaille de la vie. Un phare dont la lumière irisée vous éclaire peu à peu à votre particulière manière, à mesure que dans ce monde que vous appelez l'au-delà se tisse au fil des ans une place particulière à nul autre destinée, une place qu'on ne peut qualifier de maison; c'est un endroit où nul autre que vous ne pénètre à moins que ce soit voulu de quelque façon. Ce lieu intérieur se colore de vos émotions, sa structure est animée par vos idées, vos sentiments y développent une atmosphère qui reflète exactement les couleurs de vos désirs, mais aussi de vos cauchemars. Car vos cauchemars, ils vous hantent, directement de cette dimension de l'au-delà.

ODILE: Eh bien, qui aurait cru qu'un sage habitait mes tiroirs. Si j'ai bien compris ce que tu disais là, il faut planter un germe de rêve, l'arroser des rires et des pleurs de la vie qui s'écoule; il faut garder espoir que nos deux mondes en harmonie enfin un jour libèrent l'homme de ses misères et trouvent dans un accord mutuel la clé de nos destinées humaines! Oui, il faut aimer, il faut rire, c'est contagieux, si vous saviez! Vous le savez, Arthur, je ne parle pas pour vous. Je me le dis à moi-même. Et aux autres aussi, peut-être!

ARTHUR: Vous êtes bizarres, les humains, vous vous dites toutes sortes de choses! Parfois, c'est bon, je sais! Parfois, c'est trop, quand la réalité bute intérieurement sur un grand rêve, bien trop loin pour être atteint, et que vous tournez en rond, au milieu de cent questions. Il faut vous y mettre sans façon, ne pas laisser le temps présent vous ronger intérieurement, emportés par l'imagination.

ODILE: Mon nom dit: Oh, dis-le! Merci, petit ami, d'habiter ma maison. Tu sais, maintenant qu'on se connaît, je t'en prie, reste ici!

ARTHUR: Mais non, j'ai appris ma leçon. Ne t'inquiète ni pour toi ni pour moi. Au revoir, et, dis-le, Odile, à ta façon.

Michelle
11 février 1996

1 commentaire:

  1. J'aime bien cette cohabitation des deux mondes et cet accueil si doux et ouvert de la part d'Odile, l'humaine qui nous représente bien auprès du sage. Il est bienvenu aussi chez moi Arthur. N'importe quand ! :-)
    ■ paumier.

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