lundi 1 septembre 2014

Dialogue entre le petit homme et le grand cervidé

 
Le dieu Cernunnos avec son immense serpent à tête de bélier
Photo prise au jardin botanique en août 2013
 
A la fin de mon précédent article, j'ai écrit qu'il serait intéressant de confronter ces deux personnages l'un à l'autre:  le petit docteur blanc et le grand cervidé, qui ressemble au dieu Cernunnos de la mythologie celte.  (Merci à Carole pour le rapprochement).  Je ne savais pas trop comment les amener à dialoguer.  Je les ai d'abord interrogés à tour de rôle.  Le petit homme blanc m'a exprimé le paradoxe qui l'habite.  Il a peur du monde extérieur, par contre il sait qu'il ne peut rien expérimenter dans son athanor sans contacts humains. 

J'ai demandé au grand cervidé ce qu'il faisait chez moi.  Il m'a répondu que d'une façon certaine, je l'avais appelé ... "et je pense que ça a un certain rapport avec l'isolement du petit homme blanc.  Je suis puissant naturellement, j'ai puisé cette énergie au fil du temps autour de moi.  Dans la nature et dans tous ses prolongements."

Et à la fin de notre rencontre, le petit homme blanc s'est adressé directement au grand cervidé  (H: petit homme - C: grand cervidé)

H:  Tu crois que j'ai besoin de toi?

C:  Tous ont besoin de moi.  Je suis le dieu de l'abondance et de la régénération.

H:  Et toi, est-il possible que tu aies besoin de moi?

C:  J'ai besoin de tout ce qui vit pour continuer le monde.  Chaque élément est important.

H:  Même un apprenti-sorcier comme moi, craintif et solitaire?

C:  Tu trouveras ton chemin bien plus sûrement qu'un homme arrogant et trop confiant.

H:  Quelle peut être la place d'un petit homme comme moi dans ce vaste monde?

C:  Celle où te mèneront tes pas.  Fais confiance à la vie, elle te conduira.

H:  Dieu de la nature, ne peux-tu me donner un indice qui raffermirait ma foi?

C:  Petit homme, c'est au fond de ton âme que niche le secret qui n'appartient qu'à toi.  Je ne peux plus t'aider.  A partir de ce point-là ... c'est toi qui m'aideras!


A la prochaine,
Michelle

1er septembre 2014



10 commentaires:

  1. Bonjour Michelle,

    La relation entre le petit homme et le grand cervidé me fait penser à ce qu’est la relation de complémentarité/opposition entre la fonction supérieure, celle qui est chez un individu la plus cultivée et développée ; et la fonction inférieure, celle qui est la moins cultivée et développée chez ce même individu. Cela pourrait correspondre, par exemple, à la pensée introvertie face au sentiment extraverti. L’intégration de la quatrième fonction ou fonction inférieure est, bien sûr, une étape très importante sur le chemin vers soi-même.

    « Si l'on étudie des cas individuels, on s'aperçoit que la fonction inférieure tend à se comporter à la manière de ce héros en « fou du roi », bouffon divin ou héros idiot. Il représente la partie méprisée, dédaignée de la personnalité, la partie ridicule et inadaptée, mais aussi celle qui construit la relation avec l'inconscient et par conséquent détient la clé secrète de la totalité inconsciente de la personnalité.
    Il n'y a pas de doute que la fonction inférieure sert toujours de pont vers l'inconscient. »
    Marie-Louise von Franz, "Psychothérapie – l’expérience du praticien", Éditions Dervy

    Lorsque le grand cervidé dit :

    « Tous ont besoin de moi. Je suis le dieu de l'abondance et de la régénération. »,

    cela pourrait signifier que le grand cervidé est ici l’expression de la réalité psychique qu’est la quatrième fonction, clé secrète (parce que non visible au niveau conscient) de la totalité inconsciente de la personnalité : la régénération de la personnalité "trop étroite" est permise par l’abondance des ressources issues de la profondeur auxquelles ce "dieu cerf " nous permet d’accéder, qu’il nous dispense lorsque nous entrons véritablement* en relation avec lui.

    Amezeg

    * Voir mon prochain commentaire.

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  2. « Elle [la fonction inférieure] est sans cesse orientée vers lui et vers le monde symbolique. Mais cela ne signifie pas qu'elle est dirigée exclusivement soit vers l'intérieur, soit vers l'extérieur ; cela varie en fonction de l'individu. Par exemple, un type pensée introvertie possède une fonction inférieure sentiment extraverti. Le mouvement de celle-ci ira vers les objets extérieurs, vers les autres personnes ; mais ces autres personnes auront un sens symbolique pour l'intéressé, car ils sont les supports des symboles de l'inconscient. La signification symbolique d'un fait inconscient apparaîtra à l'extérieur comme qualité de l'objet extérieur. Si un introverti, avec sa façon habituelle d'intérioriser, affirme qu'il n'a pas besoin de téléphoner à Madame Une telle — celle-ci étant justement le symbole de son anima, donc symbolique, et la personne réelle n'a rien à y voir, si ce n'est que la projection est tombée sur elle — ; si, donc, il ne lui téléphone pas concrètement,
    il n'ira jamais jusqu'au fond de sa fonction inférieure. Il ne la prendra pas comme un problème réel, car le sentiment d'un type pensée introvertie est véritablement extraverti. S'il recourt à un tel tour de passe-passe, c'est qu'il cherche, à l'aide de sa fonction supérieure, à maîtriser sa fonction inférieure en la ramenant à l'intérieur. Il intériorise au mauvais moment, de façon à maintenir la prédominance de sa fonction supérieure sur sa fonction inférieure. Un introverti qui veut assimiler sa fonction inférieure doit accepter de se mettre en rapport avec les objets extérieurs en gardant à l'esprit qu'ils sont symboliques. Il ne doit pas cependant en conclure qu'ils ne sont que symboliques et qu'il peut donc s'en passer dans la réalité. Ce serait là une dérobade mesquine et malhonnête à laquelle recourent bon nombre d'introvertis face à leur fonction inférieure. Bien entendu, les extravertis ont recours aux mêmes subterfuges, mais en sens inverse. C'est pourquoi il faut éviter de dire que la fonction inférieure se manifeste toujours tour¬née vers l'intérieur : elle est dirigée vers l'inconscient, que celui-ci apparaisse à l'intérieur ou à l'extérieur, et elle est toujours porteuse d'expériences symboliques qui peuvent venir de l'intérieur ou de l'extérieur. » Marie-Louise von Franz, "Psychothérapie – l’expérience du praticien", Éditions Dervy

    Amezeg

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  3. Merci la Licorne, j'apprécie!

    Merci Amezeg pour tes commentaires!

    Un dialogue comme celui-là peut paraître anodin, un peu simpliste mais, il m'a fallu beaucoup de temps pour m'y mettre. Je ne savais pas trop comment mettre ces deux-là en contact l'un avec l'autre. Et j'ai écrit pendant à peu près trois heures, découvrant à mesure ce que l'un et l'autre avaient à me dire et à se dire. Et tout en imaginant, j'ai vécu intérieurement leur rencontre. C'est le but de l'exercice. Il est évident que le petit homme est une représentation de la fonction inférieure en moi, le sentiment, tu as bien raison, Amezeg. D'ailleurs Jung a écrit plus d'une fois que lui-même avait du fil à retordre avec cette même fonction. Je vis ces choses intérieures bouchée par bouchée. Et bien sûr je vis aussi des relations extérieures, en tentant de séparer réalité et projection.

    Merci encore à vous deux,
    amicalement,
    Michelle

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  4. « Il est évident que le petit homme est une représentation de la fonction inférieure en moi, le sentiment, tu as bien raison, Amezeg.».

    À vrai dire, Michelle, c’est le grand cervidé qui peut, à mes yeux, représenter la fonction inférieure en toi et je me dis que tu as peut-être noté l’un pour l’autre par erreur d’inattention (à cette heure pour toi matinale, au Québec)...(?)
    Ce que tu dis du grand cervidé* dans ton précédent billet me semble évoquer chez/par lui une indéniable disposition extravertie et "inférieure** :

    « **Un personnage sombre. » Il n’est pas dans la lumière du domaine conscient de l’avant-plan de la personnalité, mais se tient dans l’ombre de l’arrière-plan.

    et puis :
    « L'autre* au contraire me paraît plutôt frondeur, ouvert au monde extérieur. Il a confiance en lui, a du panache (littéralement aussi). Il porte un riche vêtement. Il se trouve dans un salon: la pièce de la maison qu'on ouvre à la famille, aux visiteurs, l''endroit le plus ouvert au monde extérieur. »
    et aussi : « ...... Le grand cervidé par contre m'impressionne. Il est de ces personnages qui m'intimident tellement ils sont sûrs d'eux. »

    Le grand cervidé est donc à l’aise et sûr de lui dans le monde extérieur, très ouvert aux relations " mondaines"...si tout cela ne témoigne pas d’une disposition extravertie..., je me fais moine, euh...je voulais dire animateur de variétés télévisées ! ;-)

    Amicalement,
    Amezeg

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  5. Bonjour Amezeg,

    A vrai dire j'ai pensé que c'est toi qui avais interverti les fonctions par rapport aux personnages! Mais cette dernière explication m'éclaire. Va falloir que je lise et relise tes 3 commentaires pour les comprendre un peu mieux. Je viens de feuilleter le livre des types psychologiques et j'y ai trouvé quelque chose d'intéressant dont je ne me souvenais pas. C'est que la fonction supérieure ne peut pas aider la fonction inférieure à devenir consciente, elles sont trop contraires. C'est donc la fonction secondaire, dans mon cas l'intuition, qui a la possibilité d'amener peu à peu la fonction inférieure à la conscience.

    Je vais continuer à y penser parce que, je comprends que tu dises que le petit homme représente l'intellect, mais il me semble tellement que le grand cervidé est un être essentiellement sensitif et non du type sentiment!!!

    Merci beaucoup Amezeg ... j'y réfléchis!

    Michelle

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  6. Je vais poser des questions au grand cervidé. j'espère qu'il voudra bien me répondre. Merci pour ce texte.

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  7. Bonsoir Michelle,

    Connais tu ce manga :
    https://www.youtube.com/watch?v=3JG6JDuZUoc

    Merci pour cet excellent texte,
    Jean

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  8. Non, je n'avais jamais vu cette vidéo et ne connais pas cette histoire. Merci beaucoup, Jean!
    Michelle

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  9. C'est un privilège de faire un grand rêve en compagnie de Jung. Je suis un peu jalouse que mon bien aimé Carl Gustav soit venu te voir et pas moi. Je plaisante mais je pense que tu devrais creuser le fait que le nombre du rêve soit cinq et pas quatre son nombre préféré. Y aurait-il une invitation à la quintessence ? Amitiés.

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